Bunyoni : "Je me suis caché pour ne pas finir comme le Général Adolphe Nshimirimana".
Bien que rien de nouveau ne soit rapporté dans l’affaire du Général Bunyoni et de ses coaccusés, certaines déclarations faites lors du procès sont particulièrement révélatrices sur la manière dont le Burundi est gouverné sous le régime CNDD-FDD. Aujourd’hui, le Général Bunyoni admet ce que les organisations de défense des droits de l’homme dénoncent depuis des années et que le gouvernement a toujours nié.
L’article de l’organisation FOCODE
Hier (27 mai 2024), le Général Alain Guillaume Bunyoni a été interrogé sur les raisons de sa fuite de son domicile lorsque les forces de sécurité sont venues le perquisitionner dans la nuit du 16 au 17 avril 2023, ainsi que sur l’identité de ceux qui l’avaient prévenu. Bunyoni a répondu qu’il avait été averti par deux personnes : le Général de brigade Emmanuel Ndayiziga qui lui a envoyé un message, et le Lieutenant-Général Silas Ntigurirwa qui l’a informé directement. Bunyoni a également demandé que ces deux généraux soient convoqués pour expliquer comment ils avaient prévenu quelqu’un qu’ils savaient être accusé de tentative de coup d’État.
"Je n’allais pas attendre pour me faire tuer..."
Bunyoni a expliqué ainsi les raisons de sa fuite :
"Le Général Adolphe Nshimirimana a été abattu par des hommes en uniforme et ils n’ont jamais été arrêtés ! Le Général Athanase Kararuza a été tué par des hommes en uniforme et ils n’ont jamais été arrêtés. (...) Alors, moi, en tant que Général de Police, devais-je prendre le risque alors que deux généraux m’avaient déjà averti qu’un ordre avait été donné de me tuer après la perquisition ?"
Un message fort : Les assassins des généraux Nshimirimana et Kararuza n’ont pas été arrêtés !
Des soldats et des policiers sont emprisonnés depuis neuf ans, accusés d’avoir tué le Général Adolphe Nshimirimana le 2 août 2015. Ces personnes ont prouvé qu’au moment de l’assassinat, elles n’étaient pas à Bujumbura. Les tribunaux ont recueilli suffisamment de preuves mais continuent de les condamner. Certains de ces procès sont encore en cours devant la Cour Suprême, mais la justice tarde à se faire. Pendant tout ce temps, le Général Bunyoni était en charge de la sécurité. Les services qu’il dirigeait ont fabriqué des preuves contre ces innocents. Le Général Bunyoni a montré qu’il connaissait les véritables assassins d’Adolphe Nshimirimana mais a laissé des innocents être emprisonnés.
La mort du Général de brigade Athanase Kararuza a suscité de nombreux commentaires. Les Généraux Kararuza et Rugigana avaient entamé des discussions avec le Général-Major Evariste Ndayishimiye pour que le ministre de la Défense soit issu des anciens militaires (ex-FAB), comme cela se faisait auparavant avec le ministre de la Sécurité venant des ex-FDD. Les négociations étaient bien avancées et soutenues par plusieurs diplomates européens. Le Président Nkurunziza avait manifesté son intention de nommer le Général Kararuza. C’était un tournant. Certains généraux ex-CNDD-FDD avaient juré qu’après le Général-Major Pontien Gaciyubwenge, aucun autre ex-FAB ne deviendrait ministre de la Défense. Ce groupe, incluant le Général Alain Guillaume Bunyoni, a convaincu le Président Nkurunziza de refuser cette nomination. L’assassinat du Général Kararuza visait deux objectifs : venger la mort du Colonel Darius Ikurakure et dissuader les ex-FAB de revendiquer le ministère de la Défense.
Selon le Général Bunyoni, le Général Kararuza a été tué par des soldats en uniforme national. Nos informations indiquent que ces soldats étaient dirigés par le Lieutenant-Colonel Dismas Sindaye, surnommé "GAFUNI", commandant du Bataillon Génie de Combat de Muzinda. La plupart des assassins étaient des proches de Darius Ikurakure. D’autres impliqués dans l’attentat contre Kararuza étaient des agents de renseignement dirigés par Kazungu, et le Colonel Désiré Uwamahoro a également été mentionné.
Cependant, les personnes arrêtées à l’époque n’avaient rien à voir avec ceux qui ont commis le crime. À ce moment-là, les soldats ex-FAB arrêtés étaient ceux qui assuraient la garde chez le Général Fabien Nzisabira, qui venait tout juste d’être envoyé en mission diplomatique pour représenter le Burundi en Belgique
Le Général Bunyoni dévoile ce qu’il sait. Il connaît les méthodes du régime CNDD-FDD pour assassiner et accuser des innocents. Bunyoni a lui-même joué un rôle dans ces mensonges. On ne comprend pas pourquoi la Cour Suprême n’a pas immédiatement réagi en libérant les innocents accusés de la mort d’Adolphe Nshimirimana.
Les personnes condamnées injustement ont suivi le même sort que le Général Bunyoni leur avait réservé. Ceux qui le persécutent aujourd’hui connaîtront probablement le même sort. Lors de l’audience d’aujourd’hui, le Colonel Désiré Uwamahoro, furieux, a semblé menacer le procureur en disant : "tu sais bien que nous ne resterons pas longtemps en prison, tu paieras pour ces mensonges que tu inventes contre nous !"
Les plaidoiries dans l’affaire Bunyoni et ses coaccusés se sont terminées aujourd’hui. Le verdict est attendu dans les 30 jours. Nous continuerons à vous informer des développements de cette affaire.
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