Silence d’Agathon Rwasa et perspectives politiques au Burundi : Interview avec Aimé Magera

Radio Peace fm : Bonjour, Aimé Magera, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Aimé Magera : Bonjour ! Je m’appelle Aimé Magera, un des cadres du parti CNL et son représentant à l’international. Je suis basé à Bruxelles, en Belgique.

Radio Peace fm : Pourquoi ce silence d’Agathon Rwasa ?

Aimé Magera : L’honorable Agathon Rwasa a toujours exprimé sa position ferme. Seulement, le pouvoir, à court d’arguments et pour légitimer ses manœuvres de se maintenir au pouvoir par la force, recourt à la manipulation et à la désinformation. Mais sa position est très claire : pas de soutien au Cndd-Fdd et à ses supplétifs !

Radio Peace fm : Y a-t-il une collaboration avec l’Urunani Burundi Bwa Bose ?

Aimé Magera : Nous avons été parmi les premiers artisans de la coalition Uburundi Bwa Bose. Nous y avons contribué énormément. L’honorable Agathon Rwasa, en tant que chef de file de l’opposition, avait réussi au départ à rassembler près d’une dizaine de formations politiques autour de lui. Nous avons consulté des experts en droit burundais pour que notre coalition ne soit pas attaquable au niveau légal au moment de sa publication officielle. C’est ainsi que le nombre des partis coalisés a sensiblement diminué, mais cela n’affectait pas les listes des candidats présentées par la coalition, et tous les analystes juridiques étaient unanimes sur ce point. Certainement que le pouvoir était au courant, car il y avait des taupes parmi nous qui donnaient des rapports au SNR. Le Cndd-Fdd a paniqué et a envoyé son émissaire Ntahorwamiye pour tendre un piège à l’honorable Agathon Rwasa. Échoué, le Cndd-Fdd avait d’autres options, dont le scénario qu’on observe aujourd’hui : la coalition vidée de toute sa substance et inféodée au Cndd-Fdd. Pour répondre alors à votre question, nous n’avons aujourd’hui aucun lien avec eux, comme d’ailleurs tout autre supplétif du parti au pouvoir. Seulement, nous continuons à réclamer notre contribution financière engagée lors du dépôt des listes des candidats et de leurs dossiers.

Radio Peace fm : Quelles sont vos propositions pour que les élections soient crédibles, apaisées et transparentes ?

Aimé Magera : Il n’y a pas d’élections aujourd’hui au Burundi. Regardez ! Qu’est-ce qu’on observe sur le terrain ? Rien ! On n’y voit que des descentes de Ndayishimiye sur telle ou telle colline, racontant que des blagues de mauvais goût seulement ! Nous recommandons vivement de surseoir à l’organisation des élections, d’organiser une table ronde inclusive afin de permettre le retour des réfugiés, de permettre à la société civile et aux médias de travailler librement, de déverrouiller l’espace politique et de préparer ensemble des élections libres, crédibles, inclusives et transparentes.

Radio Peace fm : Y a-t-il toujours un plan pour éliminer ou assassiner Rwasa ?

Aimé Magera : Le pouvoir concocte des plans pour éliminer physiquement et politiquement l’homme d’État burundais dans le but de monopoliser l’espace politique. Donc, le pouvoir n’a pas désarmé et continue à peaufiner des plans macabres, malheureusement, car selon Ndayishimiye, l’honorable Agathon Rwasa encore en vie est un problème pour lui. Mais il oublie que l’honorable Agathon Rwasa assassiné sera plus dangereux pour son pouvoir et pour le pays ! La junte militaire a une courte mémoire malheureusement : les planificateurs du putsch de 1993 n’ont probablement pas intégré dans leur plan les conséquences désastreuses de leur acte. Je crois qu’ils en regrettent même dans leurs tombes pour ceux qui nous ont déjà quittés.

Radio Peace fm : Que pensez-vous d’une lutte armée ?

Aimé Magera : La lutte arme est le tout dernier recours pour un peuple opprimé comme le notre. Presque 29 ans de rébellion, avec une résistance féroce sur terrain, nous avons une longue expérience par rapport à d’autres qui se sont aventurés dans cette option militaire et qui se sont retrouvés à Mtabila, Kanembwa ou Ubwari au Congo. Accident de l’histoire, ces aventuriers ramassés dans ces endroits cités-haut, ont tout oublié et ce sont eux qui gouvernent aujourd’hui notre beau pays. Ils sont en bonne position pour comprendre que la guerre n’est pas une bonne option. Ils devraient donc éviter de pousser la population au despoir. Le Burundi a trop souffert. Nous devons penser à notre avenir, au Développement. Et pour y arriver, il faut éviter à tout prix une lutte armée.

Radio Peace fm : Est-ce que la population peut garder espoir ?

Aimé Magera : Le peuple burundais n’est pas maudit pour garder indéfiniment des dirigeants médiocres, corrompus, sanguinaires, comme ceux du Cndd-Fdd ! Le peuple a toujours le dernier mot. Tôt ou tard, le peuple choisira ses propres dirigeants.